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La Scribouillasse cherche des patrons…

Depuis un mois, maintenant, je reprends du poil de la bête…et les rênes de l’écriture. J’ai retrouvé Zoé et Gertrude avec plaisir et je passe de bons moments penchée sur mon clavier. Laeken Rose est le bon choix, le livre que j’aurais dû écrire après Ring Est, le livre que j’avais d’ailleurs choisi d’écrire après Ring Est, mais que j’ai laissé détruire « parce que c’est trop léger, ça contraste trop avec ton livre précédent, tu dois te concentrer sur du noir, comme Ring Est ».

En effet, s’il est de notoriété publique que la création littéraire est tout sauf un gage de sécurité financière, la pression artistique exercée sur les auteurs est, elle, beaucoup moins connue. Entre censure et « saveur du mois », l’industrie littéraire suit un agenda précis auquel elle ne dérogera sous aucun prétexte. Le but est de faire du chiffre, pas d’accompagner ou supporter les auteurs. A de rares exceptions près, seuls les auteurs confirmés et prêts à se couler dans le moule, bénéficieront d’un suivi et de la bienveillance du milieu. Les autres, pour peu qu’ils rencontrent quelque difficulté, éprouvent des doutes, un passage à vide, que leur roman ne s’inscrive pas dans le « thème vendeur du moment », qu’il contraste avec l’œuvre précédente, ou qu’il nécessite plus de (re)travail, seront abandonnés en cours de route. Cela semble injuste, c’est une réalité du terrain. Une réalité avec laquelle nous devons composer.

Je vous ai d’ailleurs expliqué il n’y a pas si longtemps à quel point je suis ressortie meurtrie et pétrifiée face à l’écriture du second bébé (voir ici). J’en suis également ressortie plus lucide sur les impératifs en vigueur dans le secteur.

Dois-je en vouloir à l’industrie littéraire ? aux éditeurs ? aux agents littéraires ? non, bien sûr. Je doute d’ailleurs que leurs motivations soient mauvaises. Au mieux, ils cherchent juste à s’assurer une subsistance, comme tout le monde.

OK, mais…. pourquoi tu cherches des patrons, alors ? et puis d’ailleurs, c’est quoi cette histoire de patrons ?

A vrai dire, l’idée ne date pas d’aujourd’hui, elle remonte aux origines de l’empire romain (oui, rien que ça !). Mais si, rappelez-vous, Caius Maecenas. Le mec, proche d’Auguste, a inventé un truc si con qu’on a fini par lui filer son nom : promouvoir, par son soutien et son influence, les artistes et leurs oeuvres.

Autant dire que le concept a fait pas mal d’émules dans les hautes sphères. Si la Renaissance est considéré comme l’âge d’or du mécénat (trop balaise, le Caius, quand même) et qu’on y associe souvent le nom de Laurent de Médicis, la pratique était déjà bien implantée avant et même hyper à la mode au Moyen-Age. N’en déplaise à Maurice Druon, Mahaut d’Artois (vous savez, la vile conspiratrice des Rois Maudits) était en fait une fervente protectrice des arts et des lettres, une mécène badass à mort !

OK, mais….on n’est plus à l’époque des hauts-de-chausse bouffants ou des chapeaux en cônes de chantier.

En effet, mais on est à l’ère numérique ! Et c’est là que se trouve la niche du site Patreon. En gros, cette plateforme permet aux gens de soutenir, en fonction de leurs envies et moyens, des auteurs dans la création et l’élaboration d’oeuvres artistiques.
En contrepartie, les auteurs accordent à leur mécènes (ou patrons…d’où le nom du site, c’est-y pas beau, ça !) des compensations variées : statuts d’avancement, accès privilégiés aux travaux en cours, participation active au processus créatif, mention dans les remerciements, dédicaces de travaux finis, etc. La liste et les possibilités sont illimitées.

Ah ouais, je sais ! C’est du crowdfunding, en fait, ton truc !

Pas vraiment. Le crowdfunding, ou financement participatif pour ceux qui veulent éviter le barbarisme anglais, implique une participation unique, mais souvent élevée, et, surtout, cela intervient APRES le processus créatif et concerne donc souvent le financement de la mise en production du produit (lancement du premier produit d’une petite start-up, par exemple). Non non, je parle ici de véritable mécénat.

OK, mais…tu crois vraiment que des gens vont vouloir te filer du pognon, juste pour tes beaux yeux ?

Ben, tu vois, c’est là que se trouve le nœud du problème : ce n’est pas « juste pour mes beaux yeux ».

Je m’explique : avant, je trouvais tout à fait normal qu’un artiste fournisse une partie de sa production gratuitement. Je considérais ça comme une sorte d’investissement obligatoire, une façon de « se faire connaître », sans me rendre compte à quel point c’était en réalité bizarre. Un peu comme si on demandait à un toiturier ou un maçon de déjà commencer le chantier avant de lui filer le boulot.

Avec le temps et les récentes « péripéties » sociétales auxquelles le Covid-19 nous a confrontés, je me suis également rendue compte de l’existence d’une croyance collective aux effets pervers dans notre société : celle selon laquelle, contrairement à toutes les autres activités professionnelle, l’art est vu comme un jeu et les artistes comme de grands enfants qui passent leur temps à s’amuser. Dès lors, on en déduit à tort que l’art n’est pas un métier et l’artiste une entité négligeable. Ce sont d’ailleurs les grands laissés-pour-compte de la crise récente. 

Pourtant…tout ce temps passé à affiner son art, ciseler ses compétences, acquérir de l’expérience, améliorer son travail, un mot après l’autre…des milliers d’heures, le plus souvent prises sur le temps laissé libre par le « vrai » travail (celui qui « mérite » un salaire) et grignoté sur le temps de famille. Le pire, c’est que nous-mêmes, artistes, vivons ces moments avec la culpabilité au cœur, d’où cette croyance très limitante que nous ne pouvons demander à personne de payer, en plus, pour le fruit de notre travail. Après tout, personne ne nous a jamais demandé de le produire ! Sans penser que les trois-quarts des sociétés produisent des biens dont personne n’a besoin, mais que tout le monde s’arrache.

L’art est un drôle de jeu, vraiment…

C’est pourquoi j’ai choisi de me tourner vers Patreon.

Pour m’accorder la liberté d’écrire sans contraintes.
Nos goûts sont variés et nos centres d’intérêts multiples. Il est inévitable que l’écriture reflète cette pluralité. « Ring Est » est un roman noir, sombre et violent. « Laeken Rose », mon petit deuxième, est un cosy mystery à l’ambiance plus légère, porté par un duo d’enquêteurs improbable. Un soutien, même minime, allègera la charge mentale qui pèse sur moi et m’accordera la possibilité de me consacrer totalement à l’histoire et ses personnages et non plus au potentiel financier de celle-ci.

Pour m’accorder la liberté d’écrire, tout simplement.
L’écriture est un travail, un vrai. De longue haleine, semé d’embûches, de défis et d’opportunités. Un secteur plein de technicité, dans lequel la qualité de l’ouvrage dépend des compétences de l’ouvrier, où le talent, comme partout, s’acquiert à la force du poignet. 99% de boulot, 1% de talent. Une participation, aussi infime soit-elle, me permettra de libérer davantage de temps encore, du temps libre de toute considération matérielle, uniquement orienté vers un seul objectif : celui de produire plus, et mieux.

En gros, devenir meilleure dans mon job !

OK, mais….comment ça marche, ce brol ?

Le site fonctionne avec PayPal et/ou carte de crédit, et offre deux possibilités de mécénat :

De mon côté, j’ai opté pour 3 plans « standards » et 1 plan « offre limitée »:

Ce dernier plan est évidemment réservé à toutes les personnes qui me suivent depuis 4 ans. En effet, je ne compte pas lancer ma page Patreon au monde entier avant début février, d’où ce plan très spécifique.

Attention, pour la contribution personnalisée (don unique), elle n’est disponible que via le bouton « devenir contributeur » que vous trouverez sur la page créateur (scrollez vers le bas, il apparaîtra) ou via ce lien. L’option est disponible sous les plans proposés

OK, mais….tu penses que tu auras beaucoup de participants ?

En vérité, j’ignore même si j’en aurai un seul ! Tout ce que je peux dire, c’est que je connais bien la plateforme, car je fais moi-même partie des mécènes. Cela fait 2 ans, maintenant, que je maintiens un plan de contribution pour l’un des créateurs (Peace Island), juste pour le plaisir d’assister un jour à la naissance de son idée folle, celle de développer un jeu vidéo dont les héros unique sont…des chats ! ça vous semble fou ? nous sommes 2224 à le soutenir 🙂

Bref, nous verrons bien. Quoi qu’il arrive, je vous tiendrai tous au courant, et, de toute façon, le grand message de tout ceci est que cette démarche, qu’elle soit ou nom couronnée de succès, marque les prémisses d’un changement énorme qui s’est opéré en moi. Celui de ne plus considérer l’écriture comme un plaisir coupable, mais bien comme une véritable activité professionnelle.

Un travail qui mérite, après tout, salaire 🙂

Si ça vous intéresse, ça se passe par là

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