Sur des Charbons Ardents

Il y a quelques années, j’ai découvert Tony Robbins via un ami passionné de coaching qui avait suivi ses séminaires. Pour faire court, Tony Robbins, c’est cette espèce de montagne humaine de près de deux mètres de haut, avec une mâchoire de requin, des mains comme des battoirs, une voix qui semble sortir des tréfonds de la terre, un putain de regard de malade…et qui accomplit des « miracles » depuis près de quarante ans. Une petite recherche sur YouTube et c’est la foire d’empoigne aux témoignages les plus brûlants et aux extraits de séminaires où il « guérit » en quelques minutes à peine des gens suicidaires ou atteints de phobies lourdes depuis l’enfance, etc. Bref, le showman à l’américaine avec tout le sensationnalisme dont on peut rêver. Tout ce qu’il faut pour déclencher mes sirènes d’alarme internes. Attention, danger ! Escroquerie en vue ! Pire, même, à les voir tous ânonner (c’est un euphémisme, en fait, ça hurle) des mantras, mains en l’air, yeux rougis de larmes et en transe, je me suis demandée si le pote en question ne venait pas de se faire embrigader par une secte version « Skippy vous enlève tous vos soucis ». Parce que, oui, j’ai oublié de vous dire, mais l’amélioration de soi, ça se vend à des prix à quatre chiffres….minimum. Donc soit vous avez les reins solides, soit vous êtes vraiment désespérés (les deux, c’est possible aussi, remarquez). Dans tous les cas, moi, ça éveille mon côté mangouste, vous savez, cette petite bête méga-méfiante 🙂

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Mais force m’a bientôt été de constater les changements évidents dans la vie, l’humeur et le comportement de l’ami en question. Une transformation, pure et simple. De gris et effacé, il était devenu radieux. Solaire. Et, chose notable, il s’habillait toujours normalement, continuait à causer aux non-initiés sans jouer les prosélytes et ne prêchait ni le suicide collectif, ni l’abandon total de l’argent, ni l’assassinat systématique des « pigs ».  Tudju, ça marcherait donc, ces trucs débiles ?

Fast Forward. Quatre ans.

J’ai lu les livres de Mr Robbins. Je me suis prêtée au jeu des exercices. A ma grande surprise, j’ai bien dû admettre que sa technique fonctionne. Pour faire de la simplification à outrance (ça, c’est mon avertissement pour les éventuels mordus de la chose qui viendraient hurler que « c’est beaucoup plus que ça » :p ), on ne cherche pas ici à traiter les raisons qui poussent les gens à faire des choses qui leur sont nocives, mais plutôt à changer leur comportement pour éviter qu’ils recommencent et retombent dans les mêmes travers. Or, pour changer un comportement, il faut que le cerveau fasse des associations très claires. Par exemple, une vision choc et très nette des conséquences inévitablement néfastes si on n’arrête pas le comportement à problème. C’est, à la grosse louche, ce que j’avais appliqué de façon instinctive quand j’ai arrêté de fumer. A l’époque, j’avais vu une très vieille dame sortir sa cigarette en rue et se l’avoiner entre ses doigts crochus et jaunis. Elle avait les dents noircies. Je me suis imaginée devenir comme elle et ça m’a fait passer l’envie de cette saleté ad vitam aeternam. Je n’ai même jamais connu le manque de la chose et, à vrai dire, je suis passée d’un état fumeur à un état « je ne supporte même plus l’odeur, c’est immonde ». J’avais par hasard trouvé le bon levier pour un problème que j’ignorais avoir quelques minutes plus tôt (ou plutôt, je savais que c’était « mal » de fumer, mais je m’en foutais un peu). Avec Tony Robbins, le processus est raffiné jusqu’à devenir systématique et volontaire. On applique certaines méthodes pour identifier les pierres d’achoppement, d’autres pour déterminer ce qu’on aimerait obtenir comme résultat et enfin les dernières pour changer le comportement. C’est en fin de compte simple comme bonjour…si simple, en réalité, que c’est en effet très en vogue auprès des recruteurs religieux et sectaires de tout bord. En bref, entre Tony Robbins et les sectes, les méthodes sont similaires, mais pas l’intention (et c’est l’intention qui compte, on est bien d’accord 🙂 )

J’ai déjà pu agir sur deux trois choses (par exemple, si Ring Est a vu le jour, c’est parce que j’ai appliqué certaines de ses méthodes…de façon un peu bancale, certes, mais assez bien pour que ça marche 🙂 ), mais il y a encore pas mal de choses que j’aimerais améliorer en moi : des croyances limitantes, des « tics » de comportement, etc.  Assister à l’un des séminaires Tony Robbins nous trottait donc en tête depuis un bon bout de temps, mon chéri et moi, alors quand l’occasion s’est présentée d’y aller pour une somme modique (en gros, deux pour le prix d’un), nous n’avons pas hésité.

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10h du matin, premier jour. La salle se remplit et sera bientôt comble

Unleash the Power Within. 4 jours de séminaire. 14.000 participants. Au moins autant de décibels dans la salle.

10 04 2011 Tony Robbins Seminar at The Los Angeles Convention Center
vu que j’ai pas trouvé une image du film, je prends celle d’Oprah

Première impression : c’est hallucinant ! L’ambiance, la folie, l’atmosphère, le lâcher prise, les filtres qui tombent peu à peu, comme des masques qu’on abandonne à l’entrée, tout est pensé pour qu’on se sente dans cette salle, avec ces quatorze mille inconnus, venus de tous horizons (67 nationalités), comme dans un cocon de sécurité. Dès le début, le ton est donné : si on veut que ça marche, il va falloir jouer le jeu et être d’une honnêteté sans faille. Hors de question de masquer ses émotions, il faut au contraire les accueillir à coeur ouvert, car elles sont le miroir de notre nature profonde. Laissez les armes et les cottes de maille à l’extérieur. Vos décades de barrières au vestiaire. Ne soyez pas frileux, même si la température de la salle est maintenue à un niveau de frigidaire (on comprendra le deuxième jour que c’est parce que Tony Robbins a toujours trop chaud…il doit avoir du sang de pingouin, comme les gens d’ici), tout le monde est bienveillant et personne ne vous jugera. Difficile à croire ? E pur, si muove ! D’abord un peu dépassés par l’ambiance du tonnerre qui s’installe, nous nous sommes vite retrouvés à participer pleinement, tout à fait immergés dans l’expérience…jusqu’au moment que j’attendais le plus et qui, heureusement pour moi, est planifié dès le premier jour. Un vieux rêve inscrit en moi depuis que j’avais vu « Le Clochard de Beverly Hills » : j’ai marché sur des charbons ardents !!! Oui, un vrai tapis de braises rougeoyantes, comme Richard Dreyfus, Bette Midler et Nick Nolte ! Le but ? Se prouver que rien ne peut nous arrêter, pas même la peur. Je n’avais plus connu un tel déferlement d’adrénaline et d’endorphine depuis mon baptême en chute libre !!

Deuxième impression : Tony est hallucinant ! Ce mec a une présence du feu de dieu. On a beau être encore un peu timides, dès qu’il arrive sur scène, la magie opère. Sa voix transporte, son énergie déferle, sa force est palpable. Impressionnant, vraiment. Mais pas autant que l’endurance dont il fait preuve…car le bonhomme, arrivé à 11h30, n’a pas quitté la scène ni relâché son attention d’une minute jusqu’au moment du signal de fin de journée…à 22h ! 10h30 NON-STOP ! Nous, par contre, on a décroché quelques fois…déjà parce que, contrairement à Tony l’extra-terrestre, nous ne sommes que de pauvres mortels contrôlés par les cycles de leur système digestif : faim, soif, sommeil, pipiiiiii viiiiiite ! bref, vous voyez le genre. Et puis, il faisait si beau à Londres, ce jour-là. 27 degrés, ça aurait été un crime de ne pas en profiter…

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Troisième impression : Il ne faut pas se lancer dans l’aventure UPW (ouais, c’est comme ça qu’on dit quand on est hype…UPW pour Unleash the Power Within) si on n’a pas un minimum préparé pourquoi on y va et ce qu’on veut adresser comme problème. Parce que quatre jours, ça passe très très vite, même si on est là depuis 9h30 et qu’on en sort à 23h30…et on ne nous laisse pas beaucoup de temps pour se pencher sur les exercices. J’avoue, j’y étais allée un peu les mains dans les poches, je me retrouve donc à refaire les exercices dans mon coin, loin de toute l’ambiance énergisante et, disons-le, euphorisante de l’événement. That sucks, baby !

Quatrième impression : prévoyez le spray pour la gorge, les thés chaud au miel, les « cold pack », « hot pack » et autres sièges massants et lotions au camphre. Parce que vous allez crier, chanter, danser, rire, pleurer parfois, shaker your petit booty et hurler à vous en arracher les poumons. Rassurez-vous, aucun de nous n’y est habitué, mais ça vient vite et, au bout d’une ou deux heures dans la salle, c’est comme si on avait fait ça toute notre vie…et croyez-moi, c’est hyper libératoire.

Cinquième impression : il y a une vie avant et une vie après UPW. Que vous adhériez à la chose de toute la force de votre âme, que vous l’ayez gravée en vous en lettres de sang ou, tout bêtement, que vous soyez, comme Mon Chéri et moi, de simples quidams intéressés par l’expérience pour en tirer le maximum pour vous, vous en sortirez changés. Je ne prétends pas que tout vos problèmes s’effaceront comme par magie, loin de là, mais il y a un véritable effet placebo qui opère, un vrai ancrage positif qui se manifestera à chaque fois que vous y penserez et qui vous mettra de bonne humeur…et un vrai conditionnement appris pour déclencher motivation et énergie. Parfois, c’est juste ce dont on a besoin…

Mon deuxième livre a été au point mort très longtemps. Près d’un mois. La deadline que je me suis fixée approche à grands pas et ça commence à devenir très chaud pour la respecter, mais vous savez quoi ? Je vais la tenir ! Je vais le faire ! Merde, j’ai marché sur des charbons ardents, qu’est-ce qui pourrait m’arrêter ?

I am unstoppable, baby !

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Sky is the limit !

 

 

 

 

15 commentaires sur “Sur des Charbons Ardents

  1. Les manipulateurs de foule ont un talent fou, très en vogue depuis qques années, leurs intentions, bonnes ou mauvaises ont le point de remplir les poches du gourou si sympathique.
    Il me semble que chacun d’entre nous doit trouver en lui-même la volonté et l’énergie de s’améliorer 🙂
    En plus c’est gratuit parce que d’après ce que j’ai compris, ça fait chérot la boule de braise;)
    Désolée, je le dis tel que je le pense…

    1. Ah mais surtout ne t’arrête pas de dire ce que tu penses ! C’est, à quelques mots près, la même chose que ce que je disais quand on me parlait de ces trucs il y a quelques années (mais vu que j’aime beaucoup jurer comme un charretier, c’était bien moins châtié). En gros, je suis d’accord avec toi sur le fait que la force pour s’améliorer réside en nous…mais pas forcément la lucidité pour identifier ce qui ne va pas (sinon, tu penses bien qu’on aurait réglé le souci depuis longtemps 🙂 ). Comme je le dis dans l’article, je suis allée au séminaire un peu les mains dans les poches parce que les trois-quarts des choses que je voulais régler l’ont été sur les trois dernières années…mais, peut-être est-ce de la sagesse, je me suis aussi rendue compte que s’il n’y avait pas eu quelques événements traumatisants, je n’aurais jamais changé. Pourquoi faut-il toujours attendre qu’il soit (presque) trop tard ? Où serais-je arrivée si j’avais changé plus tôt ? Aurais-je pu vivre plus de moments de qualité avec ceux que j’aime avant de les perdre ? Je ne crois pas aux regrets, ce qui est fait est fait, mais je tire toujours les leçons de mes erreurs…et ne pas changer avant qu’il arrive un malheur est une erreur. Pourquoi ne l’ai-je pas vue ? Y’en a-t-il d’autres qui rampent dans l’ombre que je ne saisis pas plus que celles que j’ai laissé passer ? C’est cette question-là qui m’intéresse. Chercher ce qui est à changer que je ne vois pas encore. Et pour ça, je doute qu’agir seul obtienne de quelconques résultats… Bien sûr, je ne dis pas qu’il faut aller à un event Tony Robbins, juste que j’ai fini par comprendre pourquoi des gens « normaux » (sous-entendu sans lourd passé d’abus, de violence ou d’addiction) dépensaient de l’argent pour participer à ses séminaires. J’en suis ressortie avec un profond respect pour tous ces gens avec lesquels j’ai partagé ces quatre jours. 14000 personnes, 67 nationalités, certaines en guerres les unes contre les autres, toutes les religions représentées et pas un seul vol, pas un seul accroc, que des gens motivés par l’envie de devenir de meilleures personnes, de meilleurs parents, frères, soeurs, amants, amis… Que Tony Robbins se fasse de l’argent (beaucoup d’argent) avec, je m’en fous, en fait, d’autres s’en font bien plus sans accomplir quoi que ce soit de positif dans leur vie. Ici, au moins, il permet à certaines personnes, moins fortes peut-être que d’autres, en besoin de support, de trouver la force pour changer et vivre une vie plus heureuse. Et ça, en fait, ça n’a pas vraiment de prix 🙂

  2. Tu as pris conscience des comportements que tu as eus dans le passé parce que du temps s’est écoulé, tu as du recul maintenant et tu as réfléchi et évolué. Normal. Seules les expériences t’apportent ça. Et le temps. Tu sais quand on dit « il faut laisser du temps au temps »;) C’est bien un truc de jeunesse que de vouloir aller vite et tout anticiper:) Mais ça ne marche pas comme ça. Je comprends bien, ça serait idéal de pouvoir réagir parfaitement mais nous ne sommes que de pauvres humains;)
    Oui il y a d’autres choses qui rampent dans l’ombre, l’expérience nous apprend à les appréhender et à les reconnaitre plus vite, instinctivement, c’est tout. Et plus on va vers la fin, plus on sait profiter du peu qui reste auprès de ceux qu’on aime. Je fais ma vieille radoteuse tant pis:)
    Gourou ou pas, le fait que tu te poses toutes ces question montre que tu es quelqu’un de bien.
    En ce qui concerne l’argent je sais que des personnes assez démunies peuvent se priver des mois pour rencontrer ce genre de personnage et ça, ça me choque. On ne fait pas le bien de l’humanité en la dépouillant;)

    1. mais non, tu n’es pas une vieille radoteuse 🙂 Quant au gourou, très peu pour moi, je ne crois déjà pas en dieu, c’est pas pour aller m’en inventer un sur terre (à part Aubry Dabancourt, peut-être…et encore lol). Par contre, je te rejoins sur le prix, je n’aurais jamais fait ça si j’avais dû me priver ou mettre à risque ma maison, la nourriture de mes enfants, le bien-être de mes chats ou tout simplement mon confort de vie…

  3. J’aime beaucoup votre blog. Un plaisir de venir flâner sur vos pages. Une belle découverte. blog très intéressant. Je reviendrai. N’hésitez pas à visiter mon univers. Au plaisir

    1. Il y a souvent des réductions et je conseille franchement de prendre le ticket d’entrée de gamme, tu auras la même expérience que ceux qui sont plus chers et au moins, ça ne te ruinera pas 🙂

      1. Oui j’ai une différence notable dans les prix des billets, et apparemment ses conf se tiennent plutôt à Londres qu’à Paris..

      2. Ben, c’est un américain, il a donc plus d’atomes crochus avec nos amis anglais 🙂 mais oui, toutes les conférences ont lieu à Londres. Il en fait parfois à Amsterdam, mais c’est rare.

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