La Clé(A) du Succès

Une journée en Or – part II

Résumé de l’épisode précédent : Notre Scribouillasse a découvert, bien marrie, que l’édition est un monde impitoyable et qui rapporte peu. Si elle veut faire partie des 2% édités, il lui faudra livrer un manuscrit qui pêche…mais comment faire ?

Telle l’un des meilleurs scénaristes d’Hollywood, fourbe et rusée, je t’avais abandonné à ce cliffhanger, prêt à te ronger ongles et extrémités de tout poil. Rassure-toi, ton attente est finie et le temps est maintenant venu de lever le voile sur la suite.

Laurence Ortegat est la fondatrice  et coordinatrice de CLéA,  la Compagnie de lecteurs et d’auteurs (une cinquantaine de personnes, je pense) dont le domaine de prédilection, le core business, si tu veux, c’est la relecture de manuscrit, l’accompagnement dans l’écriture et le conseil à la publication. Pourquoi ? ben, parce que pratiquant elle-même la scribouille, elle s’est rendue compte depuis des plombes que les scribouillards présentaient souvent les mêmes faiblesses, patate !

  • L’angoisse de la feuille blanche
  • Un ventre mou dans les projets de grande haleine (vas-y, tiens, cause-moi des derniers chapitres de « Comme un Nid de Vipères dans un Panier de Crabes » que j’ai presque dû m’arracher au forceps en encaissant du retard sur les publications…)
  • L’essoufflement après le premier jet*
  • Le manque de discernement sur la qualité de l’ouvrage
  • Le syndrome Larousse** dans la course à l’éditeur

* le premier qui me fait une blague graveleuse sera maudit sur 713 générations…fais gaffe, je suis magopinaciophile !

** « je sème à tous vents », ça te dit quelque chose ?

Bon, bien sûr, vu que nous étions ici dans le cadre du Prix Fintro et que nos romans étaient dans les mains du jury depuis près de deux mois, elle n’est pas trop rentrée dans le détail sur les deux premiers points. Sache cependant que, si ça t’intéresse, CLéA organise des ateliers d’écriture (libre ou dans le cadre d’un accompagnement de projet de roman) sur Bruxelles, Liège et Namur 2 fois par mois.

Laurence, donc, s’est concentrée sur les points qui pouvaient nous aider, nous, finalistes, après l’expérience du Prix Fintro. Faudrait quand même pas oublier que, dans cette histoire, un seul d’entre nous cinq, seulement, repartira avec le pactole (enfin, tu m’as comprise, comme je l’ai dit dans l’épisode précédent, on s’attend plutôt à un pactolinet) ! Pour les autres, l’aventure s’arrêtera là…

Ou pas !

Parce qu’on aura quand même dans notre besace le fait d’avoir été finalistes ! Peut-être même que s’il y avait eu plus de places, on aurait tous été pris ! Bref, je ne veux pas la ramener (OK, quand même un petit peu), mais bon, on n’a pas écrit de la merde !

Cependant, si on ne décroche pas la première place, c’est que, quelque part, il manquait quelque chose. Pas grand-chose, hein, mais si on avait mieux relu, si on avait plus retravaillé, tiens, là, cette petite intrigue secondaire, au chapitre dix-huit, presqu’un détail et qu’on a tout à fait oubliée de résoudre, est-ce que ce ne serait pas ça qui … ?

Ne baissons donc pas les bras et préparons-nous d’ores et déjà à la vie après le Prix Fintro (d’autant plus d’actualité que l’aventure risque fort de se terminer d’ici quelques jours…t’as vu qu’on entre dans la dernière ligne droite du compte à rebours ?) parce que nos bouquins, c’est certain, c’est de la graine, sinon de best-seller, du moins d’édition.

Du coup, il faut qu’on se concentre sur deux aspects :

  • Comment savoir si notre manuscrit est assez abouti pour une présentation à un éditeur ? et
  • Comment choisir les éditeurs à qui le présenter ?

C’est là que Laurence commence à nous mettre chacun sur le grill : c’est quoi ton public-cible ? c’est quoi les effets que tu voulais obtenir ? à ton avis, c’est quoi ce qui fait la spécificité de ton bouquin ? tu t’es fait relire combien de fois ? par qui ? tu as retravaillé combien de fois ton manuscrit ?  etc.

Pour les aspects conceptuels, no stress, j’ai répondu sans même devoir réfléchir, mais pour la relecture, je te passe mon malaise…OK, R-Zéro, c’est une histoire que j’ai en moi depuis bien longtemps et que j’avais déjà couchée sur papier, il y a quinze ans…

Mais…

Je n’en ai gardé que le titre et le pitch ! Tout le reste a été changé, revu et corrigé, ré-écrit de fond en combles ! En quatre semaines chrono ! Par les portes ou par les fenêtres, ce bouquin, il fallait que je l’accouche ! J’y ai mis le point final à deux heures du matin le jour de la deadline pour la remise des manuscrits, les yeux en kikine de poupousse et les tifs en bataille, tu penses si j’ai eu le temps de me relire, encore moins de faire relire ou de retravailler le bazar avant d’aller le conduire, encore tout chaud sorti de la relieuse, au guichet de la Banque Fintro !!!

J’ai pas osé le dire aux autres. Ouais, j’ai honte, mais c’est comme ça. Je ne voulais pas être ZE cheveu dans la soupe. J’ai dit que trois personnes l’avaient lu, ce qui, techniquement, est correct…j’ai juste omis de préciser que c’était après l’avoir déposé….

Bien sûr, tu t’en doutes, malgré ces petits mensonges par omission, je suis quand même tombée dans le panneau que je voyais arriver de très très loin. Parce que les gens qui ont lu mon bouquin, ben… ils entrent direct dans la catégorie des gens à qui il ne faut pas faire relire son bouquin.

Parce qu’ils sont trop proches, parce qu’ils ne sont pas assez objectifs, parce qu’ils n’y connaissent rien, parce qu’ils ont peur de faire mal (ou au contraire parce qu’ils tireront à boulets rouges pour faire du zèle et montrer qu’ils ont pris leur boulot à coeur), parce qu’ils ne sont pas amateurs du genre, parce qu’ils vont se focaliser sur l’Oncle-Bébert-qui-ressemble-quand-même-vachement-à-tonton-Justin-que-franchement-là-tu-abuses-c’est-pas-gentil ou sur non-mais-j’aime-bien-les-romans-policiers-mais-c’est-complètement-con-ton-idée-de-chat-détective***…t’as l’embarras du choix.

*** pour info, il existe vraiment une série de bouquins avec des chats détectives et si le ton est enjoué, non, ça n’est pas de la littérature jeunesse . Ca  s’appelle The Cat who… par Lilian Jackson Braun et il y a eu au total 29 bouquins (le dernier n’a jamais été publié…saleté de faucheuse).

Alors, bon, ce n’est pas une découverte non plus, même si je ne suis pas tout à fait d’accord avec le principe. D’abord parce que, comme le dit Stephen King dans On Writing (que je te conseille plus que vivement), on écrit pour un lecteur idéal…et mon lecteur idéal, dans ce cas-ci, c’était Le Mâle. Mon chéri. Par conséquent, son avis m’importe beaucoup (même si, après, je ne suis pas tous ses conseils, hé hé hé). Ensuite, parce que si on a un bon entourage, pourquoi ne pas en profiter ?

Cela dit, le conseil reste de bon aloi car pour avoir des relecteurs efficaces, il te faudra, dans l’idéal :

  • privilégier des amateurs du genre,
  • au grand minimum 3 (plus, c’est mieux),
  • en-dehors de ton cercle proche ou privé,
  • si possible, faire en sorte que les échanges soient anonymes (en gros, ils relisent un texte sans savoir qui est l’auteur, ça évite les éventuelles tensions entre personnes), et
  • que tes relecteurs soient formés et outillés à la relecture.

Ah ben oui, mais ça se trouve pas à tous les coins de rue, ça ! Ah non, peut-être ?! Et CLéA  ?! Ah aah ! je t’ai mouché, là, hein ! CRAC, dans les ratiches ! …euh…hum…bon.

Parce que c’est comme ça que CLéA fonctionne : tu soumets ton manuscrit avec, si je ne me trompe, une petite note explicative sur le bouquin (de quoi ça parle, en quelques mots) et un extrait que tu penses représentatif. Sur base unique de cette note et de l’extrait (l’anonymat de l’auteur est donc toujours garanti), des lecteurs vont se proposer pour relire ton texte. Si au moins 3 lecteurs se proposent (des amateurs du genre, donc), hop, ton manuscrit part en relecture. Sinon, ben…c’est que ça n’a déjà pas conquis et qu’il faudrait peut-être encore retravailler de ton côté. En gros, c’est le même fonctionnement que celui qui nous pousse à choisir des bouquins en librairie : le quatrième de couverture et un extrait en ouvrant le bouquin au hasard…sauf qu’ici, l’auteur peut choisir l’extrait (c’est quand même plus sympa).

En contrepartie, tu recevras, au bout de 8 à 9 semaines, une note circonstanciée de +/- 8  pages qui détaillera ce que les lecteurs ont compris et ressenti à la lecture du texte, en dégagera les forces et faiblesses éventuelles et te proposera des pistes d’amélioration. Tu l’auras noté, aucun jugement sur le sujet choisi ou l’histoire à proprement parler (si tu as envie de créer une histoire de chats détectives, c’est ton choix), CLéA va se concentrer sur les effets produits et les soucis dans la mécanique d’écriture (syntaxe, temps, etc) de façon à aiguiller au mieux ton travail de ré-écriture.

Maintenant, soyons très clairs, ce travail n’est pas gratuit. Il t’en coûtera 175 EUR pour bénéficier de ce service…et, sans aucun doute, beaucoup d’huile de coude et de sueurs froides pour retravailler ensuite le bouquin à la lumière des conseils reçus. Ca peut paraître énorme (surtout quand tu sais les clopinettes que tu auras – peut-être, un jour – en droits d’auteur), mais, pour revenir sur l’épisode précédent, quand tu vois des scribouillards dépenser près de 400 EUR pour semer à tous vents et récolter bernique, ce n’est peut-être pas un si mauvais investissement (surtout que les conseils dégottés sur un bouquin te serviront sur tous les autres…on est là pour apprendre, ou pas ?). Utilise donc ce service de façon intelligente : envoie un manuscrit que tu penses être prêt pour l’édition et mets-toi bien en mode warrior parce que si tu n’es pas préparé à accepter les critiques et devoir remettre la main à la pâte, laisse tomber et fais péter la sortie à Disneyland Paris. Le budget est kif et, au moins, t’en sortiras avec des paillettes dans les yeux.

Si CLéA te fait de l’oeil et que tu aimerais en savoir plus, je ne peux que t’inviter à aller faire un tour, les 25 & 26 novembre prochains à Mons (Belgique) pour son salon du livre, Mon’s Livre. CLéA y aura un stand et donnera une conférence sur le thème « Préparer son manuscrit pour lui donner toutes les chances de trouver un éditeur ».

Pour clôturer sur le point CLéA, sache que s’ils ne travaillent pas avec (pour) des éditeurs et ne t’accompagneront pas dans cette partie du processus, leur travail et méthodologie sont reconnus par les professionnels du métier. De plus, CLéA organise depuis l’année dernière un prix « Coup de coeur des lecteurs CLéA » qui récompense (de façon uniquement honorifique) le texte qui leur a le plus plu….pour info, le premier texte ainsi mis en valeur, Guerre Sainte, de Bertrand Scholtus, a tapé dans l’oeil de l’un des éditeurs présents à la remise du prix !! C’est chez Ker Editions, je t’ai mis le lien vers l’article du Soir qui en cause, de fait, ça donne l’eau à la bouche !

En parlant d’éditeur, maintenant qu’on a causé de relecture et retravail…faudrait peut-être passer à la vitesse supérieure, non ? alors, on envoie tout ça à qui ?

Très bonne question, Junior ! mais il se fait tard, ce sera donc pour la part III de cette Journée en Or : Sachons plaire avec Audace !

En attendant, je vais te faire loucher un brin, mais

  • garde un oeil sur Youtube, le premier épisode du Guide du Scribouillard Néophyte ne devrait pas trop tarder (d’ailleurs, as-tu voté pour celui que tu voudrais voir ? naaaan ? tudju ! file voir et pour plus d’info), et
  • garde l’autre sur le blog, le chapitre 10 de Comme un Nid… est dispo et pour info, la sortie du prochain, c’est le mardi

 

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